Новеллы
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Тематика:
Французский язык
Издательство:
КАРО
Коммент., задан.:
Иванченко Анна Игоревна
Год издания: 2012
Кол-во страниц: 192
Возрастное ограничение: 16+
Дополнительно
Вид издания:
Практическое пособие
Уровень образования:
ВО - Бакалавриат
ISBN: 978-5-9925-0781-2
Артикул: 059122.04.99
Книга для чтения на французском языке предназначена для учащихся 10—11 классов школ с углубленным изучением французского языка, для студентов младших курсов языковых вузов, а также для широкого круга читателей, интересующихся французским языком и французской культурой. Книга снабжена лингво-страноведческим комментарием и кратким франко-русским словарем.
Тематика:
ББК:
УДК:
ОКСО:
- ВО - Бакалавриат
- 44.03.01: Педагогическое образование
- 45.03.01: Филология
- 45.03.02: Лингвистика
ГРНТИ:
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Ги де Мопассан, А. Доде М 78 Новеллы: Книга для чтения/Задания и комментарии А. И. Иванченко — СПб.: КАРО, 2012. — 192 c.: ил. — (Серия Littrature classique). ISBN 978-5-9925-0781-2. Книга для чтения на французском языке предназначена для учащихся 10—11 классов школ с углубленным изучением французского языка, для студентов младших курсов языковых вузов, а также для широкого круга читателей, интересующихся французским языком и французской культурой. Книга снабжена лингво-страноведческим комментарием и кратким франко-русским словарем. УДК 372.8 ББК 81.2 Фр-93 УДК 372.8 ББК 81.2 Фр-93 М 78 © «КАРО», 2004 ISBN 978-5-9925-0781-2
1850, Château de Miromesnil, Seine-Maritime — 1893, Paris Après une enfance libre et heureuse en Normandie, il assiste à la débâcle de 1870, puis accepte un emploi de fonctionnaire à Paris (parmi ces bureaucrates que l’on retrouve dans La Parure, Le Protecteur, L’Héritage). Parallèlement à une vie sportive et joyeuse, il fait son “apprentissage” littéraire sous la direction de Flaubert, ami de la famille, qui lui impose les exigences de l’esthétique réaliste et
lui fait connaître Daudet et Zola. La nouvelle Boule-de-Suif (1880) détermine sa vocation et lui assure le succès. Vivant désormais de ses livres, il publie quelque trois cents nouvelles en dix ans. Dans ses œuvres, il évoque la Normandie, rappelle des souvenirs de la guerre de 1870, dénonce la médiocrité et le cynisme des milieux parisiens. Débordant de sensuelle vitalité, visitant sur son yacht l’Angleterre, l’Italie, l’Afrique du Nord, il est progressivement assombri par des troubles nerveux et la hantise de la mort. Aux hallucinations succède le délire, et il meurt après dix-huit mois d’internement. Qu’il parle le savoureux patois normand de ses paysans ou décrive avec une précision lucide la montée de l’angoisse, Maupassant est bien le maître de la nouvelle, qui a appris à l’école de Flaubert à rechercher “la vérité choisie et expressive”. S’écartant de l’esthétique naturaliste, il veut donner à la vie une “vision plus complète, plus saisissante, plus probante que la réalité même”; d’où un style savamment simple, des notations brèves et aiguës sur le décor et sur les personnages. Le récit, souvent banal, simple comme un scénario, a “l’aspect, le mouvement de la vie même”.
Paris était bloqué1, affamé et râlant. Les moineaux se faisaient bien rares sur les toits, et les égouts se dépeuplaient. On mangeait n’importe quoi. Comme il se promenait tristement par un clair matin de janvier le long du boulevard2 extérieur, les mains dans les poches de sa culotte d’uniforme et le ventre vide, M. Morissot, horloger de son état et pantouflard par occasion, s’arrêta net devant un confrère qu’il reconnut pour un ami. C’était M. Sauvage, une connaissance du bord de l’eau.
Chaque dimanche, avant la guerre, Morissot partait dès l’aurore, une canne en bambou d’une main, une boîte en fer-blanc sur le dos. Il prenait le chemin de fer d’Argenteuil, descendait à Colombes, puis gagnait à pied l’île Marante. A peine arrivé en ce lieu de ses rêves, il se mettait à pêcher; il pêchait jusqu’à la nuit. Chaque dimanche, il rencontrait là un petit homme replet et jovial, M. Sauvage, mercier, rue Notre-Dame-de-Lorette, autre pêcheur fanatique. Ils passaient souvent une demi-journée côte à côte, la ligne à la main et les pieds ballants au-dessus du courant; et ils s’étaient pris d’amitié l’un pour l’autre. En certains jours, ils ne parlaient pas. Quelquefois ils causaient; mais ils s’entendaient admirablement sans rien dire, ayant des goûts semblables et des sensations identiques. Au printemps, le matin, vers dix heures, quand le soleil rajeuni faisait flotter sur le fleuve tranquille cette petite buée qui coule avec l’eau, et versait dans le dos des deux enragés pêcheurs une chaleur de saison nouvelle, Morissot parfois disait à son voisin: “Hein! quelle douceur!” et M. Sauvage répondait: “Je ne connais rien de
meilleur.” Et cela leur suffisait pour se comprendre et s’estimer. A l’automne, vers la fin du jour, quand le ciel, ensanglanté par le soleil couchant, jetait dans l’eau des figures de nuages écarlates, empourprait le fleuve entier, enflammait l’horizon, faisait rouge comme du feu entre les deux amis, et dorait les arbres roussis déjà, frémissants d’un frisson d’hiver, M. Sauvage regardait en souriant Morissot et prononçait: “Quel spectacle!” Et Morissot émerveillé répondait, sans quitter des yeux son flotteur: “Cela vaut mieux que le boulevard, hein?” Dès qu’ils se furent reconnus, ils se serrèrent les mains énergiquement, tout émus de se retrouver en des circonstances si différentes. M. Sauvage, poussant un soupir, murmura: “En voilà des événements!” Morissot, très morne, gémit: “Et quel temps! C’est aujourd’hui le premier beau jour de l’année.” Le ciel était, en effet, tout bleu et plein de lumière. Ils se mirent à marcher côte à côte, rêveurs et tristes. Morissot reprit: “Et la pêche? hein! quel bon souvenir!” M. Sauvage demanda: “Quand y retournerons-nous?”
Ils entrèrent dans un petit café et burent ensemble une absinthe*; puis ils se remirent à se promener sur les trottoirs. Morissot s’arrêta soudain: “Une seconde verte, hein?” M. Sauvage y consentit: “A votre disposition.” Et ils pénétrèrent chez un autre marchand de vins. Ils étaient fort étourdis en sortant, troublés comme des gens à jeun dont le ventre est plein d’alcool. Il faisait doux. Une brise caressante leur chatouillait le visage. M. Sauvage, que l’air tiède achevait de griser, s’arrêta: “Si on y allait? — Où ça? — A la pêche, donc. — Mais où? — Mais à notre île. Les avant-postes français sont auprès de Colombes. Je connais le colonel Dumoulin; on nous laissera passer facilement.” Morissot frémit de désir: “C’est dit. J’en suis.” Et ils se séparèrent pour prendre leurs instruments. Une heure après, ils marchaient côte à côte sur la grand-route. Puis ils gagnèrent la villa une absinthe
qu’occupait le colonel. Il sourit de leur demande et consentit à leur fantaisie. Ils se remirent en marche, munis d’un laissez-passer. Bientôt ils franchirent les avant-postes, traversèrent Colombes abandonné, et se trou-vèrent au bord des petits champs de vigne qui descendent vers la Seine. Il était environ onze heures. En face, le village d’Argenteuil semblait mort. Les hauteurs d’Orgemont et Sannois dominaient tout le pays. La grande plaine qui va jusqu’à Nanterre était vide, toute vide, avec ses cerisiers mûrs et ses terres grises. M. Sauvage, montrant du doigt les sommets, murmura: “Les Prussiens sont là-haut!” Et une inquiétude paralysait les deux amis devant ce pays désert. “Les Prussiens!” Ils n’en avaient jamais aperçu, mais ils les sentaient là depuis des mois, autour de Paris, ruinant la France, pillant, massacrant, affamant, invisibles et tout-puissants. Et une sorte de terreur superstitieuse s’ajoutait à la haine qu’ils avaient pour ce peuple inconnu et victorieux. Morissot balbutia: “Hein! si nous allions en rencontrer?”