Мадемуазель Фифи
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Тематика:
Французский язык
Издательство:
КАРО
Автор:
Мопассан Ги
Коммент., словарь:
Панайотти Ольга Петровна
Год издания: 2016
Кол-во страниц: 224
Дополнительно
Вид издания:
Художественная литература
Уровень образования:
ВО - Бакалавриат
ISBN: 978-5-9925-1092-8
Артикул: 721131.01.99
«Мадемуазель Фифи» — один из самых известных сборников новелл Ги де Мопассана. Персонажи новелл, вошедших в сборник, — люди очень разные: это и прусские офицеры, изнывающие от скуки в захваченном замке французского аристократа, и проститутки, демонстрирующие невероятную силу духа, и скучающие дамы, ищущие приключений, и солдаты, идущие на гибель, но не предающие Францию. Предлагаем вниманию читателей неадаптированный текст новелл с комментариями и словарем.
Тематика:
ББК:
УДК:
ОКСО:
- ВО - Бакалавриат
- 44.03.01: Педагогическое образование
- 45.03.01: Филология
- 45.03.02: Лингвистика
ГРНТИ:
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УДК 372.8 ББК 81.2 Фр-93 М78 ISBN 978-5-9925-1092-8 Мопассан, Ги де. М78 Мадемуазель Фифи : книга для чтения на французском языке. — Санкт-Петербург : КАРО, 2016. — 224 с. — (Littérature classique). ISBN 978-5-9925-1092-8. «Мадемуазель Фифи» — один из самых известных сборников новелл Ги де Мопассана. Персонажи новелл, вошедших в сборник, — люди очень разные: это и прусские офицеры, изнывающие от скуки в захваченном замке французского аристократа, и проститутки, демонстрирующие невероятную силу духа, и скучающие дамы, ищущие приключений, и солдаты, идущие на гибель, но не предающие Францию. Предлагаем вниманию читателей неадаптированный текст новелл с комментариями и словарем. УДК 372.8 ББК 81.2 Фр-93 © КАРО, 2016
MADEMOISELLE FIFI Le major, commandant prussien, comte de Farlsberg, achevait de lire son courrier, le dos au fond d’un grand fauteuil de tapisserie et ses pieds bottés sur le marbre élégant de la cheminée, où ses éperons, depuis trois mois qu’il occupait le château d’Uville, avaient tracé deux trous profonds, fouillés un peu plus tous les jours1. Une tasse de café fumait sur un guéridon de marqueterie maculé par les liqueurs, brûlé par les cigares, entaillé par le canif de l’offi cier conquérant qui, parfois, s’arrêtant d’aiguiser un crayon, traçait sur le meuble gracieux des chiff res ou des dessins, à la fantaisie de son rêve nonchalant. Quand il eut achevé ses lettres et parcouru les journaux allemands que son vaguemestre venait de lui apporter, il se leva, et, après avoir jeté au feu trois ou quatre énormes morceaux de bois vert2, car ces 1 fouillés un peu plus tous les jours — понемногу углублявшиеся с каждым днем 2 le bois vert — здесь: сырые дрова
GUY DE MAUPASSANT 4 messieurs abattaient peu à peu le parc pour se chauffer, il s’approcha de la fenêtre. La pluie tombait à fl ots1, une pluie normande qu’on aurait dit jetée par une main furieuse, une pluie en biais, épaisse comme un rideau, formant une sorte de mur à raies obliques, une pluie cinglante, éclaboussante, noyant tout, une vraie pluie des environs de Rouen, ce pot de chambre2 de la France. L’offi cier regarda longtemps les pelouses inondées, et, là-bas, l’Andelle3 gonfl ée qui débordait; et il tambourinait contre la vitre une valse du Rhin, quand un bruit le fi t se retourner: c’était son second, le baron de Kelweingstein, ayant le grade équivalent à celui de capitaine. Le major était un géant, large d’épaules, orné d’une longue barbe en éventail formant nappe sur sa poitrine4; et toute sa grande personne solennelle éveillait l’idée d’un paon militaire, un paon qui aurait porté sa queue déployée à son menton. Il avait 1 La pluie tombait à fl ots — Дождь лил как из ведра 2 le pot de chambre — ночной горшок 3 Andelle — Андель, река в Нормандии, правый приток Сены 4 une longue barbe en éventail formant nappe sur sa poitrine — длинная окладистая борода, покрывавшая его грудь словно скатертью
MADEMOISELLE FIFI 5 des yeux bleus, froids et doux, une joue fendue d’un coup de sabre dans la guerre d’Autriche; et on le disait brave homme autant que brave offi cier. Le capitaine, un petit rougeaud à gros ventre, sanglé de force, portait presque ras son poil ardent, dont les fi ls de feu auraient fait croire, quand ils se trouvaient sous certains refl ets, sa fi gure frottée de phosphore. Deux dents perdues dans une nuit de noce, sans qu’il se rappelât au juste comment, lui faisaient cracher des paroles épaisses qu’on n’entendait pas toujours; et il était chauve du sommet du crâne seulement, tonsuré comme un moine1, avec une toison de petits cheveux frisés, dorés et luisants, autour de ce cerceau de chair nue. Le commandant lui serra la main, et il avala d’un trait sa tasse de café (la sixième depuis le matin), en écoutant le rapport de son subordonné sur les incidents survenus dans le service; puis tous deux se rapprochèrent de la fenêtre en déclarant que ce n’était pas gai. Le major, homme tranquille, marié chez lui, s’accommodait de tout; mais le baron capitaine, viveur tenace, coureur de bouges, forcené trousseur de fi lles, rageait d’être enfermé depuis 1 tonsuré comme un moine — с тонзурой, как у монаха (тонзура — выбритое место на макушке, знак принадлежности к духовенству)
GUY DE MAUPASSANT 6 trois mois dans la chasteté obligatoire de ce poste perdu. Comme on grattait à la porte, le commandant cria d’ouvrir, et un homme, un de leurs soldats automates, apparut dans l’ouverture, disant par sa seule présence que le déjeuner était prêt. Dans la salle ils trouvèrent les trois offi ciers de moindre grade: un lieutenant, Otto de Grossling; deux sous-lieutenants, Fritz Scheunaubourg et le marquis Wilhem d’Eyrik, un tout petit blondin fi er et brutal avec les hommes, dur aux vaincus, et violent comme une arme à feu. Depuis son entrée en France, ses camarades ne l’appelaient plus que Mlle Fifi . Ce surnom lui venait de sa tournure coquette, de sa taille fi ne qu’on aurait dit tenue en un corset, de sa fi gure pâle où sa naissante moustache apparaissait à peine, et aussi de l’habitude qu’il avait prise, pour exprimer son souverain mépris des êtres et des choses, d’employer à tout moment la locution française — fi , fi donc, qu’il prononçait avec un léger siffl ement. La salle à manger du château d’Uville était une longue et royale pièce dont les glaces de cristal ancien, étoilées de balles, et les hautes tapisseries des Flandres, tailladées à coups de sabre et pendantes
MADEMOISELLE FIFI 7 par endroits, disaient les occupations de Mlle Fifi , en ses heures de désœuvrement. Sur les murs, trois portraits de famille, un guerrier vêtu de fer1, un cardinal et un président, fumaient de longues pipes de porcelaine, tandis qu’en son cadre dédoré par les ans, une noble dame à poitrine serrée montrait d’un air arrogant une énorme paire de moustaches faite au charbon. Et le déjeuner des offi ciers s’écoula presque en silence dans cette pièce mutilée, assombrie par l’averse, attristante par son aspect vaincu, et dont le vieux parquet de chêne était devenu solide comme un sol de cabaret. À l’heure du tabac, quand ils commencèrent à boire, ayant fi ni de manger, ils se mirent, de même que chaque jour, à parler de leur ennui. Les bouteilles de cognac et de liqueurs passaient de main en main; et tous, renversés sur leurs chaises, absorbaient à petits coups répétés, en gardant au coin de la bouche le long tuyau courbé que terminait l’œuf de faïence, toujours peinturluré comme pour séduire des Hottentots2. 1 vêtu de fer — закованный в доспехи 2 Hottentots — готтентоты, этническая общность на юге Африки
GUY DE MAUPASSANT 8 Dès que leur verre était vide, ils le remplissaient avec un geste de lassitude résignée. Mais Mlle Fifi cassait à tout moment le sien, et un soldat immédiatement lui en présentait un autre. Un brouillard de fumée âcre les noyait, et ils semblaient s’enfoncer dans une ivresse endormie et triste, dans cette saoulerie morne des gens qui n’ont rien à faire. Mais le baron, soudain, se redressa. Une révolte le secouait; il jura: « Nom de Dieu, ça ne peut pas durer, il faut inventer quelque chose à la fi n. » Ensemble le lieutenant Otto et le sous-lieutenant Fritz, deux Allemands doués éminemment de physionomies allemandes lourdes et graves, répondirent: « Quoi, mon capitaine? » Il réfléchit quelques secondes, puis reprit: « Quoi? Eh bien, il faut organiser une fête, si le commandant le permet. » Le major quitta sa pipe: « Quelle fête, capitaine? » Le baron s’approcha: « Je me charge de tout, mon commandant. J’enverrai à Rouen Le Devoir, qui nous ramènera des dames; je sais où les prendre. On préparera ici un souper; rien ne manque d’ailleurs, et, au moins, nous passerons une bonne soirée. » Le comte de Farlsberg haussa les épaules en souriant: « Vous êtes fou, mon ami. »
MADEMOISELLE FIFI 9 Mais tous les offi ciers s’étaient levés, entouraient leur chef, le suppliaient: « Laissez faire le capitaine, mon commandant, c’est si triste ici. » À la fi n le major céda: « Soit, » dit-il; et aussitôt le baron fi t appeler Le Devoir. C’était un vieux sousoffi cier qu’on n’avait jamais vu rire, mais qui accomplissait fanatiquement tous les ordres de ses chefs, quels qu’ils fussent1. Debout, avec sa fi gure impassible, il reçut les instructions du baron, puis il sortit; et, cinq minutes plus tard, une grande voiture du train militaire, couverte d’une bâche de meunier tendue en dôme, détalait sous la pluie acharnée, au galop de quatre chevaux. Aussitôt un frisson de réveil sembla courir dans les esprits; les poses alanguies se redressèrent, les visages s’animèrent et on se mit à causer. Bien que l’averse continuât avec autant de furie, le major affi rma qu’il faisait moins sombre, et le lieutenant Otto annonçait avec conviction que le ciel allait s’éclaircir, Mlle Fifi elle-même ne semblait pas tenir en place. Elle se levait, se rasseyait. Son œil clair et dur cherchait quelque chose à briser. Soudain, fi xant la dame aux moustaches, le jeune blondin tira 1 quels qu’ils fussent — какими бы они ни были
GUY DE MAUPASSANT 10 son revolver. « Tu ne verras pas cela toi », dit-il; et, sans quitter son siège, il visa. Deux balles successivement crevèrent les deux yeux du portrait. Puis il s’écria: « Faisons la mine! » Et brusquement les conversations s’interrompirent, comme si un intérêt puissant et nouveau se fût emparé de tout le monde. La mine, c’était son invention, sa manière de détruire, son amusement préféré. En quittant son château, le propriétaire légitime, le comte Fernand d’Amoys d’Uville, n’avait eu le temps de rien emporter ni de rien cacher, sauf l’argenterie enfouie dans le trou d’un mur. Or, comme il était fort riche et magnifi que, son grand salon, dont, la porte ouvrait dans la salle à manger, présentait, avant la fuite précipitée du maître, l’aspect d’une galerie de musée. Aux murailles pendaient des toiles, des dessins et des aquarelles de prix, tandis que sur les meubles, les étagères, et dans les vitrines élégantes, mille bibelots, des potiches, des statuettes, des bonshommes de Saxe1 et des magots de Chine, des ivoires an 1 des bonshommes de Saxe — фигурки из саксонского фарфора