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Лунный свет

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Предлагаем вниманию читателей один из самых известных сборников новелл Ги де Мопассана. Герои этих новелл — люди очень разные: священники и страстные охотники, обманутые мужья и жены и счастливые влюбленные, добропорядочные буржуа и даже сам Сатана. Автор то нежен, то ироничен, то саркастичен, одних героев он любит, других презирает, но язык его неизменно изящен и прост. В книге приводится неадаптированный текст новелл с комментарияхми и словарем.
Мопассан, Г. Лунный свет : книга для чтения на фрацузском языке : художественная литература / Г. де Мопассан. — Санкт-Петербург : КАРО, 2016. — 224 с. — (Litterature classique). - ISBN 978-5-9925-1115-4. - Текст : электронный. - URL: https://znanium.com/catalog/product/1048609 (дата обращения: 22.11.2024). – Режим доступа: по подписке.
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УДК 
372.8
ББК 
81.2 Фр-93
М78

ISBN 978-5-9925-1115-4

 
Мопассан, Ги де.
М78 Лунный свет : книга для чтения на французском языке. — Санкт-Петербург : КАРО, 
2016. — 224 с. — (Littérature classique).

ISBN 978-5-9925-1115-4.

Предлагаем вниманию читателей один из самых известных сборников новелл Ги де Мопассана. Герои этих 
новелл — люди очень разные: священники и страстные 
охотники, обманутые мужья и жены и счастливые влюбленные, добропорядочные буржуа и даже сам Сатана. 
Автор то нежен, то ироничен, то саркастичен, одних героев он любит, других презирает, но язык его неизменно 
изящен и прост.
В книге приводится неадаптированный текст новелл 
с комментариями и словарем.

УДК 372.8
ББК 81.2 Фр-93

© КАРО, 2016

Clair de lune

l portait bien son nom de bataille, 

l’abbé Marignan. C’était un grand prê
tre maigre, fanatique, d’âme toujours 

exaltée, mais droite. Toutes ses croyances étaient 

ixes, sans jamais d’oscillations. Il s’imaginait sin
cèrement connaître son Dieu, pénétrer ses desseins, 

ses volontés, ses intentions.

Quand il se promenait à grands pas dans l’allée de 

son petit presbytère de campagne, quelquefois une 

interrogation se dressait dans son esprit : « Pourquoi 

Dieu a-t-il fait cela ? » Et il cherchait obstinément, 

prenant en sa pensée la place de Dieu, et il trouvait 

presque toujours. Ce n’est pas lui qui eût murmuré 

dans un élan de pieuse humilité : « Seigneur, vos 

desseins sont impénétrables ! » Il se disait : « Je suis 

le serviteur de Dieu, je dois connaître ses raisons 

d’agir, et les deviner si je ne les connais pas. »

Guy de Maupassant
4

Tout lui paraissait créé dans la nature avec une 

logique absolue et admirable. Les « Pourquoi » et 

les « Parce que » se balançaient toujours. Les auro
res étaient faites pour rendre joyeux les réveils, 

les jours pour mûrir les moissons, les pluies pour 

les arroser, les soirs pour préparer au sommeil et 

les nuits sombres pour dormir.

Les quatre saisons correspondaient parfaite
ment à tous les besoins de l’agriculture ; et jamais 

le soupçon n’aurait pu venir au prêtre que la nature 

n’a point d’intentions et que tout ce qui vit s’est plié, 

au contraire, aux dures nécessités des époques, des 

climats et de la matière.

Mais il haïssait la femme, il la haïssait incon
sciemment, et la méprisait par instinct. Il répétait 

souvent la parole du Christ : « Femme, qu’y a-t-il de 

commun entre vous et moi ? » et il ajoutait : « On 

disait que Dieu lui-même se sentait mécontent 

de cette œuvre-là. » La femme était bien pour lui 

l’enfant douze fois impure dont parle le poète1. 

Elle était le tentateur qui avait entraîné le premier 

1 Мопассан упоминает стихотворение Альфреда де Виньи 
(1797–1863) «La colère de Samson» («Гнев Самсона»)

Clair de lune

homme et qui continuait toujours son œuvre de 

damnation, l’être faible, dangereux, mystérieuse
ment troublant. Et plus encore que leur corps de 

perdition, il haïssait leur âme aimante.

Souvent il avait senti leur tendresse attachée à lui 

et, bien qu’il se sût inattaquable, il s’exaspérait de ce 

besoin d’aimer qui frémissait toujours en elles.

Dieu, à son avis, n’avait créé la femme que pour 

tenter l’homme et l’éprouver. Il ne fallait approcher 

d’elle qu’avec des précautions défensives, et les 

craintes qu’on a des pièges. Elle était, en eff et, toute 

pareille à un piège avec ses bras tendus et ses lèvres 

ouvertes vers l’homme.

Il n’avait d’indulgence que pour les religieuses 

que leur vœu rendait inoff ensives ; mais il les trai
tait durement quand même, parce qu’il la sentait 

toujours vivante au fond de leur cœur enchaîné, 

de leur cœur humilié, cette éternelle tendresse qui 

venait encore à lui, bien qu’il fût un prêtre.

Il la sentait dans leurs regards plus mouillés de 

piété que les regards des moines, dans leurs ex tases 

où leur sexe se mêlait, dans leurs élans d’amour 

Guy de Maupassant
6

vers le Christ, qui l’indignaient parce que c’était de 

l’amour de femme, de l’amour charnel ; il la sentait, 

cette tendresse maudite, dans leur docilité même, 

dans la douceur de leur voix en lui parlant, dans 

leurs yeux baissés, et dans leurs larmes résignées 

quand il les reprenait avec rudesse.

Et il secouait sa soutane en sortant des portes 

du couvent, et il s’en allait en allongeant les jambes 

comme s’il avait fui devant un danger1.

Il avait une nièce qui vivait avec sa mère dans 

une petite maison voisine. Il s’acharnait à en faire 

une sœur de charité.2

Elle était jolie, écervelée et moqueuse. Quand 

l’abbé sermonnait, elle riait ; et quand il se fâchait 

contre elle, elle l’embrassait avec véhémence, le 

serrant contre son cœur, tandis qu’il cherchait 

involontairement à se dégager de cette étreinte 

qui lui faisait goûter cependant une joie douce, 

éveillant au fond de lui cette sensation de paternité 

qui sommeille en tout homme.

1  comme s’il avait fui devant un danger — как если бы он бежал от опасности
2  Il s’acharnait à en faire une sœur de charité. — Он вознамерился сделать из нее сестру милосердия.

Clair de lune

Souvent il lui parlait de Dieu, de son Dieu, en 

marchant à côté d’elle par les chemins des champs. 

Elle ne l’écoutait guère1 et regardait le ciel, les 

herbes, les leurs, avec un bonheur de vivre qui se 

voyait dans ses yeux. Quelquefois elle s’élançait 

pour attraper une bête volante, et s’écriait en la 

rapportant : « Regarde, mon oncle, comme elle 

est jolie ; j’ai envie de l’embrasser. » Et ce besoin 

d’ « embrasser des mouches » ou des grains de lilas 

inquiétait, irritait, soulevait le prêtre, qui retrouvait 

encore là cette indéracinable tendresse qui germe 

toujours au cœur des femmes.

Puis, voilà qu’un jour l’épouse du sacristain, qui 

faisait le ménage de l’abbé Marignan, lui apprit avec 

précaution que sa nièce avait un amoureux.

Il en ressentit une émotion eff royable, et il de
meura suff oqué, avec du savon plein la igure, car il 

était en train de se raser.

Quand il se retrouva en état de réléchir et de 

parler, il s’écria : « Ce n’est pas vrai, vous mentez, 

Mélanie ! »

1  Elle ne l’écoutait guère — Она совсем его не слушала

Guy de Maupassant
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Mais la paysanne posa la main sur son cœur : 

« Que Notre-Seigneur me juge si je mens, monsieur 

le curé. J’ vous dis qu’elle y va tous les soirs sitôt 

qu’ votre sœur est couchée. Ils se retrouvent le long 

de la rivière. Vous n’avez qu’à y aller voir entre dix 

heures et minuit. »

Il cessa de se gratter le menton, et il se mit à 

marcher violemment, comme il faisait toujours en 

ses heures de grave méditation. Quand il voulut 

recommencer à se barbiier, il se coupa trois fois 

depuis le nez jusqu’à l’oreille.

Tout le jour, il demeura muet, gonlé d’in
dignation et de colère. À sa fureur de prêtre, devant 

l’invincible amour, s’ajoutait une exaspération de 

père moral, de tuteur, de chargé d’âme, trompé, 

volé, joué par une enfant ; cette suff ocation égoïste 

des parents à qui leur ille annonce qu’elle a fait, 

sans eux et malgré eux1, choix d’un époux.

Après son dîner, il essaya de lire un peu, mais il 

ne put y parvenir ; et il s’exaspérait de plus en plus. 

Quand dix heures sonnèrent, il prit sa canne, un 

1  sans eux et malgré eux — без них и вопреки им

Clair de lune

formidable bâton de chêne dont il se servait toujours 

en ses courses nocturnes, quand il allait voir quelque 

malade. Et il regarda en souriant l’énorme gourdin 

qu’il faisait tourner, dans sa poigne solide de cam
pagnard, en des moulinets menaçants. Puis, soudain, 

il le leva, et, grinçant des dents, l’abattit sur une 

chaise dont le dossier fendu tomba sur le plancher.

Et il ouvrit sa porte pour sortir ; mais il s’arrêta 

sur le seuil, surpris par une splendeur de clair de 

lune telle qu’on n’en voyait presque jamais.

Et comme il était doué d’un esprit exalté, un de 

ces esprits que devaient avoir les Pères de l’Église1, 

ces poètes rêveurs, il se sentit soudain distrait, ému 

par la grandiose et sereine beauté de la nuit pâle.

Dans son petit jardin, tout baigné de douce 

lumière, ses arbres fruitiers, rangés en ligne, des
sinaient en ombre sur l’allée leurs grêles membres 

de bois à peine vêtus de verdure ; tandis que le chè
vrefeuille géant, grimpé sur le mur de sa maison, 

exhalait des soufles délicieux et comme sucrés, 

1  Pères de l’Église — Отцы Церкви, почетный титул, используемый с конца IV в. применительно к группе выдающихся церковных деятелей и писателей прошлого

Guy de Maupassant
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faisait lotter dans le soir tiède et clair une espèce 

d’âme parfumée.

Il se mit à respirer longuement, buvant de l’air 

comme les ivrognes boivent du vin, et il allait à pas 

lents, ravi, émerveillé, oubliant presque sa nièce.

Dès qu’il fut dans la campagne, il s’arrêta pour 

contempler toute la plaine inondée de cette lueur 

caressante, noyée dans ce charme tendre et languis
sant des nuits sereines. Les crapauds à tout instant 

jetaient par l’espace leur note courte et métallique, 

et des rossignols lointains mêlaient leur musique 

égrenée qui fait rêver sans faire penser, leur mu
sique légère et vibrante, faite pour les baisers, à la 

séduction du clair de lune.

L’abbé se remit à marcher, le cœur défaillant, 

sans qu’il sût pourquoi. Il se sentait comme aff aibli, 

épuisé tout à coup ; il avait une envie de s’asseoir, 

de rester là, de contempler, d’admirer Dieu dans 

son œuvre.

Là-bas, suivant les ondulations de la petite 

rivière, une grande ligne de peupliers serpentait. 

Une buée ine, une vapeur blanche que les rayons 

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